Dette gabonaise : Ntoutoume Ayi plaide pour une thérapie de choc

À l’occasion de la première édition du Gabon Economic Forum qui s’est tenue du 7 au 8 juillet 2025 , Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, directeur général de la Dette, a prononcé un exposé à la fois rigoureux et lucide sur la situation financière du Gabon. Face à une dette publique qui étouffe les marges de manœuvre de l’État, le haut fonctionnaire appelle à une thérapie de choc, condition selon lui d’un redressement économique durable.

Au-delà des chiffres, l’intervention de Ntoutoume Ayi s’est attachée à déconstruire les indicateurs trop souvent brandis sans nuance. Le taux d’endettement, critère de convergence adopté par la CEMAC et l’Union européenne, est selon lui un miroir déformant. Comparer un stock (l’encours de la dette) à un flux (le PIB) ne permet pas, selon lui, de saisir la soutenabilité réelle de l’endettement, d’autant que les modes de calcul divergent. Là où l’administration évalue actuellement la dette gabonaise à 56–57 % du PIB, le FMI l’estime à plus de 70 %, intégrant des engagements à court terme et des arriérés domestiques (salaires des fonctionnaires, rappels soldes, etc.) que la direction de la Dette exclut.

Mais c’est un autre indicateur qui, selon Ntoutoume Ayi, révèle la gravité de la situation : le ratio entre le service de la dette et les ressources propres de l’État. En 2024, ce ratio atteignait 75 %. Une fois les salaires et les remboursements déduits, moins de 100 milliards de francs CFA demeurent pour faire fonctionner la machine étatique. « C’est difficilement soutenable », alerte-t-il, soulignant que l’on s’endette désormais pour rembourser la dette, et non pour investir.

Le poids des échéances à venir, notamment les eurobonds de 2029 et 2030, alimente cette tension budgétaire croissante. Conséquence : Peu de partenaires acceptent aujourd’hui de prêter au Gabon sur le long terme.

Pour Ntoutoume Ayi, la fuite en avant n’est plus tenable. « Tant qu’on croit qu’on peut rembourser Pierre avec l’argent de Joseph, et Joseph avec celui de Paul, on fait de la cavalerie », assène-t-il.

Il insiste sur l’urgence d’un sursaut national, avant de lâcher, comme une provocation lucide : « Peut-être qu’il faudra vendre Comilog… au moins, on règle la question et on recommence à réfléchir. »

Par cette prise de parole, le directeur général de la Dette ne se contente pas d’alerter. Il propose un choc thérapeutique — une rupture nécessaire avec les habitudes budgétaires du passé — pour restaurer la capacité d’action de l’État et rebâtir la confiance des partenaires financiers.