CEMAC : la BEAC abaisse son taux directeur, le FMI émet des réserves

Dans un contexte marqué par un ralentissement de l’inflation et une amélioration des réserves de change, la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a décidé d’assouplir sa politique monétaire pour la première fois depuis 2023. Réuni le 24 mars 2025 à Malabo, le Comité de politique monétaire (CPM) de la BEAC a annoncé une réduction de son principal taux directeur, qui passe de 5,00 % à 4,50 %, ainsi qu’une baisse du taux de la facilité de prêt marginal, désormais fixé à 6,00 % contre 6,75 % précédemment. Le taux de dépôt, en revanche, reste inchangé à 0,00 %, tout comme les coefficients de réserves obligatoires.

Cette inflexion de la politique monétaire intervient dans un contexte de stabilisation macroéconomique dans la zone CEMAC. Après avoir dépassé les 4 % en 2024, l’inflation devrait reculer à 2,9 % en 2025, se situant ainsi sous le seuil communautaire de 3 %. Par ailleurs, les réserves de change ont augmenté pour atteindre 7 584,9 milliards de FCFA (soit 12,48 milliards de dollars), couvrant désormais 4,8 mois d’importations contre 4,6 mois un an plus tôt.

Une décision critiquée par le FMI

Malgré ces évolutions positives, la décision de la BEAC suscite des réserves de la part du Fonds monétaire international (FMI). Dans son rapport annuel publié en février 2025, le FMI a mis en évidence la fragilité persistante de la situation macroéconomique de la région, caractérisée par une reprise timide. Après une croissance du PIB réel de 2,5 % en 2023, la progression amorcée en 2024 devrait atteindreisant par l’institution.

En outre, la BEAC a relevé une dégradation de la position extérieure et le non-respect des objectifs en matière d’avoirs extérieurs nets. Le FMI recommande donc une intensification des efforts budgétaires, en particulier par une mobilisation accrue des recettes fiscales hors secteur pétrolier, une réforme des subventions énergétiques et une gestion plus rigoureuse de la dette publique.

Quels impacts pour les économies de la CEMAC ?

Pour les États membres, cet assouplissement monétaire pourrait alléger les coûts de financement sur les marchés régionaux. Dans un contexte où plusieurs pays de la CEMAC ont multiplié les émissions de titres publics ces dernières années, la baisse des taux pourrait entraîner une diminution des rendements obligataires et offrir un certain soulagement budgétaire.

Cependant, cette stratégie comporte des risques. Certains observateurs craignent que l’assouplissement monétaire n’exacerbe les tensions inflationnistes, bien que le gouverneur de la BEAC, Yvon Sana Bangui, se veuille rassurant. Il souligne que l’inflation en zone CEMAC est avant tout importée et dépend davantage de la structure économique des pays membres – encore largement dépendants des importations – que de la politique monétaire. Il plaide ainsi pour la mise en œuvre effective des stratégies d’import-substitution adoptées par les États.

Une relance conditionnée à des réformes structurelles

Au-delà de cet ajustement monétaire, la BEAC appelle à la prudence et insiste sur l’importance de poursuivre les réformes structurelles pour renforcer la résilience économique de la sous-région. La volatilité des prix des matières premières, la forte dépendance aux revenus pétroliers et les déséquilibres budgétaires demeurent des vulnérabilités majeures.