
Audit et conseil : le retrait de PwC et EY rebat les cartes en Afrique francophone
- Le corporate
- 6 juillet 2025
- Editorial
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En l’espace de quelques mois, le secteur du conseil a connu un bouleversement discret mais significatif en Afrique francophone subsaharienne. Deux géants du domaine, PwC et EY, ont successivement annoncé leur retrait du réseau régional couvrant cette zone. Une onde de choc qui pourrait marquer un rééquilibrage des forces au sein des Big Four, sinon, le début d’une nouvelle ère pour les cabinets locaux.
Le premier signal fort est venu le 1er avril 2025, lorsque PwC a officialisé sa séparation d’avec son réseau Afrique francophone subsaharienne (AFSS), après plus d’un demi-siècle de présence. Dix pays étaient concernés, notamment la Côte d’Ivoire, le Gabon, le Cameroun, le Sénégal, le Congo et la RDC. Ce retrait a été justifié par des divergences de gouvernance, des tensions internes sur les standards de conformité et une volonté de réorganisation structurelle.
Trois mois plus tard, le 3 juillet, EY a suivi le même chemin. Le cabinet a annoncé à son tour son désengagement du réseau Afrique francophone subsaharienne, évoquant pour sa part une stratégie de recentrage sur des zones jugées plus intégrées, comme les pôles anglophones et le Maghreb. L’objectif affiché : alléger la gestion opérationnelle et renforcer l’autonomie des entités locales.
La décision concerne les succursales de neuf pays que sont la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Sénégal, le Gabon, la Guinée, la Guinée équatoriale, le Tchad, le Congo et la République démocratique du Congo. Ces structures devraient migrer vers des entités indépendantes.
Ces deux décisions, prises à quelques mois d’intervalle, interrogent sur la pertinence des modèles de fonctionnement des grands cabinets dans des contextes africains très hétérogènes. La coexistence entre standards globaux et réalités locales semble de plus en plus difficile à concilier. Le secteur du conseil, souvent perçu comme le bras droit des gouvernements, des bailleurs et des entreprises multinationales, entre ainsi dans une période d’incertitude… mais aussi de réinvention.
Car derrière ces retraits se profile une recomposition du paysage. KPMG et Deloitte, les deux autres membres du Big Four, pourraient tirer profit de l’espace désormais libéré pour renforcer leur présence régionale.
En parallèle, plusieurs analystes estiment que ce contexte constitue une opportunité unique pour les cabinets africains indépendants. À moyen terme, on pourrait assister à l’émergence de champions africains du conseil, capables de rivaliser avec les standards internationaux tout en intégrant les spécificités locales.
Ce d’autant plus que le marché du conseil en Afrique subsaharienne francophone n’est pas négligeable. Selon une estimation de Deloitte France, il est évalué entre 300 et 400 millions d’euros, soit environ 196 à 262 milliards de FCFA. Le Sénégal, à lui seul, représenterait un marché de 20 milliards de FCFA. Au Gabon, on dénombre près de 50 cabinets de conseil et bureaux d’études, répartis majoritairement entre Libreville et Port-Gentil, pour un chiffre d’affaires estimé entre 4 et 8 milliards de FCFA.